Omar Ba en six questions
Le peintre sénégalais Omar Ba présente ses nouvelles toiles jusqu’au 27 octobre 2018, à la galerie Templon, à Paris. Ses peintures, de technique mixte, représentent le plus souvent des motifs politiques et sociaux, des jeux symboliques, des humains zoomorphes…
Pourquoi un tel titre pour votre seconde exposition à la galerie Templon, « l’autopsie de nos consciences »?
Dans le monde, j’ai remarqué que les choses se répètent, qu’elles ne changent pas, les plus dures notamment, comme la guerre, la violence économique. Il y a de vraies permanences. J’ai voulu faire l’autopsie de ces faits, les analyser. Tout poser sur la table.
Les tableaux sont directs, assez engagés. Peut-être plus qu’avant ?
J’ai enlevé plus de choses, je suis allé directement dans le vif du sujet. Je ne cherche plus à embellir la réalité. Les titres sont très feutrés et en même temps, la critique est directe. Elle n’est pas couverte.
Selon vous, l’art peut-il faire changer les choses ?
Il peut. Le simple fait, me concernant,de dire toutes ces choses, de tendre vers ça, c’est une situation de confort. Je sais que je suis inclus dans un système économique, que je suis un artiste dans une galerie commerciale. Toutefois, j’ai la liberté de dire ce que je pense, et je pose des interrogations sur ces phénomènes, haut et fort. Seul, je ne changerai rien, mais collectivement, les artistes le peuvent.
Vos œuvres sont marquées par leur verticalité…
Je favorise la verticalité, c’est vrai. Mes compositions sont souvent des personnages, en pied. Moi-même, je regarde du bas vers le haut, de manière très axiale. Après, cette exposition marque l’apparition du carré, je gagne en largeur. Cela me permet de complexifier les compositions, d’inclure plus de personnages.
Vous avez grandi à Dakar, dans les années 1990, au moment où le monde de l’art sénégalais était tiraillé entre la « négritude » de Léopold Sédar Senghor, et des voies alternatives, comme Agit’art. Est-ce que cela a forgé votre manière de considérer l’art ?
Au début oui, mais le fait de voyager, de vivre en Europe, tout cela m’a fait sortir de cette vision du monde. Aujourd’hui, ma conscience est faite d’influences mixtes. Ce que je souhaite, c’est bâtir des ponts entre les Nord et les Sud…
D’ailleurs, c’est ce qui explique votre passage de l’abstraction à la figuration, quand vous êtes arrivé à Genève ?
Effectivement, ce passage a été nourri par une frustration, le besoin d’être compris. Je venais du Sénégal, mais les gens ne comprenaient pas mon travail, ne savaient pas lire mon abstraction. J’ai dû trouver une façon de communiquer, qui convienne partout. Après, certains motifs sont restés, la couleur est toujours aussi importante… mais mon langage est plus universel.