Le projet Oumlil par l’artiste peintre EL Meya s’expose à la galerie rhizome

El Meya, La Chambre du Couple, 2020 Acrylique sur toile. © galerie rhizome et El Meya
El Meya, La Chambre du Couple. Acrylique sur toile. © galerie rhizome et EL Meya. Photo Mehdi Hachid

Oumlil est la première monographie de l’artiste EL Meya comprenant une série d’œuvres qu’elle a développées entre 2015 et 2017. C’est aussi le titre de son exposition individuelle qui s’ouvre le 20 mars 2021 à la galerie rhizome d’Alger et qui sera visible jusqu’au 10 Avril.

Le livre comprend plus de vingt peintures et croquis et a été délibérément conçu et produit dans un style et un format pour imiter une «exposition mobile». L’ouvrage réalisé à la main, en édition limitée, comprend également des essais de cinq autrices, dont Anissa Bouayed: «A propos d’El Meya et d’Oumlil : l’Ogresse, c’est elle !», Guillemette Grobon «EL Meya, peintre du face à face.», Hajar Bali: «El Meya, la peinture, et l’énergie insaisissable.», Karima Lazali: «Une érotique de l’ennui» et Bernadette Dufrene-Nadia Saou: «Aller de l’avant! Une femme en peinture ».

Née en 1988 à Constantine, Algérie, EL Meya vit et travaille à Alger. Diplômée de l’Ecole des Beaux-Arts d’Alger en 2013, l’artiste questionne les représentations de sa société algérienne, maghrébine et méditerranéenne, la place de la peinture au regard de l’histoire de l’art. La peinture d’El Meya, dans sa forme naïve, n’est nullement innocente. Elle traite du corps, de la chair et des blessures.

A propos d’EL Meya et d’Oumlil : l’Ogresse, c’est elle ! Extraits du texte de Anissa Bouayed

El Meya, Le Salon, 2020 Acrylique sur toile. © galerie rhizome et El Meya
EL Meya, Le Salon, 2015-2017. 290 x 300 cm. Acrylique sur toile.
© galerie rhizome et EL Meya. Photo Mehdi Hachid

Oumlil, Oum Lil. Ce projet porte un nom, un nom qui se compose comme on tisse une toile, polysémique par ses entremêlements de références arabes à la mère et à la nuit, de référence berbère à la Mer Méditerranée. Il est comme une invitation à penser large, à embrasser une histoire longue, aux influences réciproques entre civilisations.

(…) Le projet Oumlil est à la jonction d’une approche anthropologique sur les rites, les mythes, le sacré et de réflexions esthétiques sur la représentation des symboles, sur les limites de la représentation de la sexualité, du corps, de la violence, de la mort… ce qui lui confère cette énorme charge transgressive. Il y a quelque chose de performatif dans cette prise de risque. Le défi est là, dans la transgression. « Il n’y a pas d’œil innocent » disait l’historien de l’art Ernst Gombrich.

El Meya, La Mort d'Ismail, 2020 Acrylique sur toile. © galerie rhizome et El Meya
EL Meya, La Mort d’Ismail, 2017. 90 x 150 cm. Acrylique sur toile. © galerie rhizome et EL Meya. Photo Mehdi Hachid

(…) La première impression ressentie relève de la catégorie du choc visuel. Même si la marge de manœuvre est étroite, EL Meya a évité de tomber dans la provocation avec ses risques d’être gratuite, contre-productive et répulsive. Sa stratégie, c’est d’étonner, voire de déranger ; qui fait que l’on s’arrête pour prendre le temps de comprendre ce que peindre signifie, pour elle et pour nous. Elle tend ses toiles entre la réalité et nous, pour lutter contre les « évidences », les apparences, contre les choses « allant de soi », qui « crèvent les yeux »… Elle nous demande de cheminer de toile en toile, devant lesquelles nous ferions « arrêt sur image », comme devant autant d’écrans, pour nous troubler d’abord, pour qu’on s’interroge ensuite, une fois passée ce premier sentiment d’inquiétante étrangeté.

(…) Ainsi le projet Oumlil raccorde les portraits de femmes mais aussi d’hommes à la question du pouvoir ; elle saisit dans la famille, – ce plus petit dénominateur commun de la structure sociale – qu’elle scrute en différents moments, ces couples truculents et inquiétants pour dire la question de la distribution de l’autorité dans le mariage, dans la maison avec des espaces « genrés » comme le salon ou la rue… Elle dévoile l’impact de la division domestique du travail qui s’applique à ces notions d’espaces intérieurs et extérieurs comme autant de chasses gardées de l’un ou l’autre sexe.

El Meya, Le Couple, 2020 Acrylique sur toile. © galerie rhizome et El Meya
EL Meya, Le Couple, 2017. 155 x 135 cm. Acrylique sur toile.
© Collection privée. Photo Mehdi Hachid

(…) Ces œuvres sont stimulantes, car elles nous demandent une lecture active, en cherchant ce qu’il y a dessous autant que ce qu’on voit dessus, ou qu’on imagine à côté, dans cet immatériel hors-champ pourtant nécessaire et présent à nos esprits.

(…) Oumlil nous propose une lecture tournante, permettant de circuler dans un véritable régime de l’imaginaire, qui est bien plus qu’une accumulation d’archétypes univoques et incontestés. Et c’est sans doute la leçon qu’on peut retirer de cette représentation d’un monde fortement imprégné de morale mais qui n’est pas présenté comme un système définitivement clos. EL Meya montre aussi que l’identité personnelle coexiste avec les identités statutaires, qu’il peut exister des espaces de non-conformité... et que le pouvoir d’imagination permet de jouer avec les frontières, pour les rendre mouvantes.

Le travail d’EL Meya a été présenté dans de nombreuses expositions en Algérie et à l’étranger. L’artiste a réalisé une résidence d’artiste en 2021 à La VillaArson, Nice, France/ et en 2018 La Friche Belle de Mai, Marseille, France et Résidence Méditerranée, L’Institut Français, Algérie. EL Meya est représentée par la galerie rhizome, Alger.

Oumlil
Exposition de l’artiste EL Meya et publication de la monographie du même nom
Du 20 Mars au 10 Avril 2021
Galerie rhizome –> https://rhizome.gallery
Alger, Algérie

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